Lynda Lemay, La passion toujours la passion

11 novembre 2006

Journal de Montréal – 11 novembre 2006

Lynda LemayD’ici deux ans, Lynda Lemay célébrera vingt ans de carrière. Elle a composé plusieurs centaines de chansons, vendu des millions de disques. Pourtant, la passion résiste.

Non, Lynda Lemay n’écrit pas une chanson chaque jour, contrairement à la croyance populaire. Elle en écrit une par… semaine.
Ces temps-ci, avec un bébé de trois mois à la maison, la tournée outre-mer à peine terminée, l’enregistrement de son nouvel albumet les affaires (son bureau est à la maison), elle a ralenti un peu.
À peine neuf chansons cette année.

« La famille passe avant tout et j’écris seulement quand je suis inspirée, corrige-t-elle. Je ne force jamais rien. Mais aussitôt que je pose la guitare sur mon ventre, surtout avec le son d’une Boucher (la marque québécoise de la guitare que je vais utiliser en spectacle), je redécouvre le bonheur de jouer et l’inspiration prend le dessus. »
Facile, direz-vous. Pas vraiment. L’auteure-compositrice passe des heures à chercher le bon mot, la bonne expression, l’harmonie. « Des heures à bûcher, admet-elle,mais je ne veux pas que ça finisse. Pour moi, les paroles ne sont pas accessoires. »

Deux vieilles amies

Les thèmes fétiches de Lynda Lemay tournent toujours autour de la famille, des relations parents-enfants, de la jeunesse, la vieillesse, la maladie, l’évolution de l’être humain et sa génétique. Dans Ma signature, elle débute la ronde des chansons avec Je m’appelle Marguerite et la termine avec Tu t’appelles Marguerite, deux mélodies sur l’histoire de deux vieilles amies d’enfance qui se retrouvent au foyer de vieillards. La première se remémore les beaux moments de leur vie, la seconde est atteinte de la maladie d’Alzheimer. Un texte déchirant, mais aussi rempli d’espoir.

« J’étais tellement fière de cette mélodie, un mélange de Billy Idol et Meat Loaf, s’enthousiasme la chanteuse, que j’ai composé trois textes différents sur cette chanson. Je voulais que le texte soit à la hauteur de la musique. »

Vitesse folle

Ma signature est aussi une «dédicace à la vie et à l’enfant qui vient de naître». Plusieurs titres touchent à ce que vivent les mères: J’voudrais voir ton visage, Si je ne te fais pas d’enfant, Çam’fout la frousse, notamment.

Vingt ans bientôt que la chanteuse a remporté le concours de chanson de Granby en 1989. «Ça passe vite. Plus j’avance en âge et plus ça passe vite», admet-elle. D’avoir eu 40 ans l’indiffère. «C’est incroyable. Surtout quand la vie est bien remplie. Les Noël se succèdent à une vitesse folle.»

Deux bébés
Lynda Lemay vient d’accoucher de deux bébés dont elle est très fière: sa fille Ruby et le dixième albumde sa carrière, intitulé Ma signature.

Habituellement discrète sur sa vie privée, Lynda Lemay n’a cette fois pas le choix de mêler famille et boulot. Tout au long de l’enregistrement de son nouvel album, la chanteuse était enceinte. Les deux «naissances» sont intimement liées.

Enceinte de sa deuxième fille, Lynda Lemay, 40 ans, a aussi fait en France la tournée de son opéra folk Un éternel hiver. Après les représentations de deux heures et demie, elle s’adonnait à des after show de plus d’une heure, à la guitare, et s’amusait avec ses fans, essayait de nouvelles chansons.

Nourrie de bonheur

La future maman a chanté jusqu’au septième mois de grossesse, réalisé la session de photos pour sa pochette d’album avec son gros ventre caché derrière sa guitare.

«Cette enfant-là a eu la guitare sur l’oreille durant des mois et des mois, confirme Lynda. Moi, j’étais un peu plus fatiguée,mais portée par tous ces projets, dont le plus grand était de donner la vie. Je sais que je la (sa fille) nourrissait de bonheur, puisque je vivais ma passion à temps plein.»

La paresseuse de la gang

Le phénomène n’est pas nouveau pour Lynda. Enceinte de Jessie, sa plus grande, la fille de Patrick Huard, elle avait enregistré un album éponyme en France. La chanteuse a l’habitude d’abattre beaucoup de travail, même enceinte: « J’étais surprise d’être obligée d’écouter la télé le soir pour me reposer, avoue-t-elle. Habituellement, même le soir je continue. »

Rien d’étonnant donc à ce que le premier extrait de Ma signature s’intitule Une mère. Cette mélodie s’est imposée toute seule puisqu’elle résume bien la couleur et le thème de l’album.

Lynda Lemay n’a jamais pris d’année sabbatique. Elle a tenté de le faire un jour, mais est vite revenue sur sa décision. Dire que jeune, elle était entre ses deux soeurs, « la paresseuse de la gang » : « Quand c’était le temps de la vaisselle, j’avais une poussée d’inspiration », avoue-t-elle aujourd’hui en riant.

Retour aux sources

Pour son dixième albumen carrière, Lynda Lemay est revenue à la base de sa musique, l’essence même ce que qu’elle est depuis toujours: guitare et mots. Un retour aux sources, à l’époque de ses premières aventures en France, avec son complice Yves Savard, lorsqu’elle a fait sa première rencontre avec Charles Aznavour, son mentor, en 1996.

L’auteure-compositrice joue même de son instrument, «sa concubine, sa demi-soeur», sur une dizaine de mélodies, exercice qu’elle laissait auparavant à des guitaristes plus expérimentés.

Il en résulte un album dépouillé mais rempli de cordes, un album sans flaflas inutiles qui compte des envolées musicales spontanées, beaucoup d’émotion et une voix de femme superbe: «Enceinte de ma première fille, je perdais des basses, pas cette fois, au contrairema voix était plus belle, peut-être parce que le bébé était plus petit. (Ruby pesait 6 lb et 2 onces à la naissance).

Avec son amoureux

Ma signature est vraiment une histoire de famille. Lynda Lemay a été guidée dans ce projet d’album par son conjoint, le réalisateur Michael Weisinger qui a, selon elle, su mettre en évidence les subtilités de ses paroles et musiques, lui apporter un petit côté folk américain (il est américain).

Travailler ensemble sur ce premier projet commun s’est avéré une belle aventure: «Nous avons la même façon de penser, de travailler dans le respect des gens, sans se compliquer la vie, avec la même façon harmonieuse, simple et naturelle. Nous sommes aussi tous les deux perfectionnistes.»