14 novembre 2006
Le Soleil – 14 novembre 2006
Lynda Lemay reprend du service avec Ma signature. Guitare et voix fluette, textes tristounets et guillerets, la chanteuse reprend les ingrédients qui ont fait les succès de la formule Lemay.
Un grand sourire illumine son visage un peu trop apprêté. Fidèle à sa réputation, Lynda Lemay est d’humeur jasante et chantante quand elle reçoit les journalistes pour présenter son 10e album, Ma signature.
La chanteuse-aux-trois-millions- de-disques revient, après l’épopée de son opéra folk Un éternel hiver — qui fut, en termes de ventes, la moins bonne performance de sa carrière —, à du « vrai Lynda ». Comprendre, de l’émotion, des sanglots, mais aussi des éclats de rire dans la voix.
Côté musique, Ma signature marque le retour de son guitariste et complice Yves Savard, entendu avec Robert Charlebois, Isabelle Boulay et Chloé Sainte-Marie. Côté arrangements, le dernier-né de la discographie Lemay mise sur la sobriété, pour une tournée québécoise dans de petites salles dans un « trip boîte à chansons ».
« J’avais envie de revenir à quelque chose de très dépouillé pour mes 17 ans sur scène, explique la chanteuse. On boucle une boucle, par la musique, mais aussi par les thèmes qui sont abordés dans l’album, qui sont du vrai Lynda. »
Rayon légèreté, on trouve dans l’album l’autodérision des Souliers verts dans deux morceaux écrits par l’auteure dans sa jeunesse, Les Culottes grises et Le Dernier Choix, inspiré par de douloureux souvenirs de cours d’éducation physique au secondaire. La frêle chanteuse en rit encore. « C’est une chanson très vraie : j’étais toujours la dernière sur le banc. »
Un album équilibré
« Dans la jeunesse, on a quelque chose de très beau, on a une originalité qui est ben le fun », juge-t-elle. Les perles de son vivier de chansons, rodées en public ou non, Lynda Lemay les regrouperait dans un projet d’album qu’elle intitulerait bien Chanter comme au début.
De fait, les compositions plus récentes de l’album contrastent avec ces titres par leur gravité. Il y a d’abord la mélancolique déclaration d’amitié d’une femme à sa complice d’enfance, Tu t’appelles Marguerite, et son écho, Je m’appelle Marguerite, qui ouvrent et ferment l’album.
« C’est la mélodie dont je suis la plus fière. J’ai beaucoup bûché pour trouver le texte, j’en ai écrit plus d’une version. Je ne savais pas de quoi j’allais parler », raconte Lynda Lemay. Laissant parler l’émotion, elle évoque sur ses accords de guitare la perte de mémoire.
« Il y a des peurs, des douleurs ou des moments de lucidité dans Marguerite. Il faut toujours laisser cette note d’espoir, même si les gens trouvent que parfois certaines chansons sont un peu noires », consent-elle.
La plume de Lynda écorche également le malheur qui frappe une famille contrainte d’abandonner sa maison, faute d’argent, dans Sables mouvants, ou encore le passage d’un couple devant l’état civil pour sceller leur séparation dans Le Traité de solitude.
« Je trouve que c’est un album bien équilibré, dans les moments plus tristes et les moments plus gais. C’est moi, j’assume », justifie l’atiste. Et d’ajouter : « J’ai rarement fait des chansons positives. Quand j’écris sur l’amour, je vais plus écrire sur la rupture. »
Hommage aux mères
Pour le reste, la chanteuse a plutôt le cœur à la fête. Maman pour la deuxième fois, elle a laissé libre cours à sa fertile imagination pour aborder l’attente impatiente des neuf mois (J’voudrais voir ton visage), ses peurs et angoisses (Ça m’fout la frousse).
« J’ai appris, j’ai évolué. J’ai précisé mon style d’écriture, cette signature que j’ai. C’est sûr que maintenant, j’ai une famille, je suis une mère avec tout ce que ça comporte », explique-t-elle.
Pas étonnant que Ma signature rende hommage, après Mon père c’est le plus fort, aux mères. « J’ai écrit Une mère parce que je suis mère et que je suis entourée de mères. C’est une réflexion. Quand on est mère, il y a moins de légèreté, d’insouciance, on s’occupe de notre famille. En même temps, c’est ce qui nous donne la plus grande fierté », s’anime Lynda Lemay.
C’est avec un peu d’appréhension qu’elle se préparait à délaisser le pouponnage pour la première fois depuis la naissance de sa petite Ruby il y a trois mois pour partir quelques jours en France, promotion oblige. « Je pense que je suis plus ambitieuse dans ma famille que dans ma carrière », juge-t-elle.
Pour sa carrière, en revanche, Lynda Lemay ne se tourne pas les sangs. « Je n’ai jamais eu de déceptions ou de gros flops. Cet album, j’en suis fière. Il me semble que si j’étais fan de moi-même, c’est ce que j’aimerais. »